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− | Robert Bouchet : « J’ai imaginé une Torres ».
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− | Catherine et Bruno Marlat
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− | Avant de retracer l’activité de luthier qu’a eue Robert Bouchet, il faut évoquer son talent de peintre et
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− | de dessinateur ainsi que les qualités exceptionnelles qui lui ont permis d’occuper une place singulière
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− | dans l’histoire de la lutherie.
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− | Robert Bouchet a souvent été interrogé sur les raisons et les circonstances qui l’ont conduit à devenir
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− | luthier. Il racontait alors que, mobilisé en 1939 dans les troupes de défenses passives, il avait avec lui
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− | une guitare flamenca : « Je l’avais achetée au Marché au Puces pour un prix dérisoire mais je l’aimais
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− | beaucoup. Nous avions peu à faire et je jouais de la guitare. Avec un gars qui avait un violon et un
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− | autre qui chantait, on s’amusait à faire un orchestre. Lors de la retraite, ma guitare était avec mes
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− | affaires personnelles dans un camion. A l’approche des troupes allemandes, j’ai jugé plus sage de
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− | laisser la guitare et de partir à bicyclette. Le camion a été pris avec des camarades et les affaires. J’ai
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− | ainsi échappé à l’emprisonnement. » Cet épisode biographique peut expliquer pourquoi Bouchet a
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− | voulu construire une première guitare : pour remplacer celle qu’il avait perdue. Mais cela n’explique
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− | pas comment, en 1946, cet artiste peintre, de 48 ans, est parvenu à construire une guitare
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− | suffisamment réussie pour être encouragé par ses amis musiciens à continuer dans cette voie. Car
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− | Bouchet est avant tout un artiste peintre, il le reste jusqu’à son décès.
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− | 1. Robert Bouchet en août 1986 (coll. Privée, DR).
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− | I La peinture
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− | Ce désir s’est manifesté très tôt, dès la fin de sa scolarité, à 17 ans. Il prend alors des cours avec le
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− | peintre et décorateur Jules Wielhorski. Très vite son talent est reconnu. En 1922, six de ses toiles sont
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− | acceptées au Salon d’Automne de Paris dont il devient sociétaire puis membre du jury. Il expose
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− | également aux salons des Tuileries et des Indépendants. Remarqué par la critique, un marchand d’art
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− | vend ses toiles : paysages, portraits, nus et natures mortes. [photos 2,3 et 4]. Il ne fait partie d’aucun
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− | courant, d’aucune mode ou avant-garde. Selon un de ses amis peintre, il est plutôt dans la lignée de
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− | Foujita ou Utrillo. Jusqu’en 1936, il vit de sa peinture et des décors qu’il réalise pour le Théâtre
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− | national de l’Opéra.
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− | 2. Les toits rouges, 1936 (coll. privée, DR). 3. Fleurs au vase bleu (coll. privée, DR).
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− | En 1936, il apprend que l’Ecole des Arts Décoratifs cherche un professeur de dessin. Il rédige un
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− | curriculum vitae pour poser sa candidature. Sur ce document on peut lire la définition qu’il donne de
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− | lui-même : artiste peintre, décorateur, ancien combattant ainsi que la formation qu’il indique avoir
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− | reçue : élève de Jules Wielhorski. On ne peut imaginer de formation plus succincte, aucune école
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− | n’est mentionnée, aucune formation académique. Jules Wielhorski a donc été son seul professeur –
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− | peut-être devrait-on dire son guide tant les capacités personnelles de Bouchet semble avoir toujours
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− | réduit ou supprimé le temps d’apprentissage. Devenu professeur, il s’efforce d’enseigner à ses élèves
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− | la qualité qu’il estime essentielle pour savoir dessiner. Il la résume ainsi : « Il faut savoir regarder,
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− | c'est-à-dire savoir interroger un modèle ». Bouchet possède cette faculté au plus haut point, comme
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− | un don. Il semble qu’il lui suffise d’observer minutieusement un phénomène, un mécanisme, un objet
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− | pour en comprendre le fonctionnement. Ses amis et ses proches témoignent de la variété des
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− | domaines dans lesquels il excellait. Les exemples sont multiples et divers, au gré de ses besoins et
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− | de sa curiosité.
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− | 4. Crouttes sous la neige (coll. G. Rampin, DR).
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− | Lors de son service militaire, qu’il effectue en Turquie de 1917 à 1918, il travaille à l’entretien et à la
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− | réparation des véhicules de l’armée. Sans aucune expérience précédente en mécanique automobile,
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− | il devient en peu de temps « chef mécanicien ». Pour une exposition à New York, il reproduit, en
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− | modèle réduit, les navires de Christophe Colomb et de Champlain. Ce sont les premiers ouvrages de
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− | précision qu’il réalise en bois.
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− | Pendant la seconde guerre mondiale, après la perte de sa guitare, il est démobilisé. Il s’improvise
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− | d’abord architecte et maçon. Il rebâtit et agrandit une maison en ruine que son beau-frère met à sa
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− | disposition à Gargilesse dans l’Indre. [photo 5]. Il peut ainsi accueillir la famille de son épouse. Nourrir
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− | tout le monde, en ces périodes difficiles, ne lui pose pas plus de problème, il apprend à planter des
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− | pommes de terre et même du tabac pour sa pipe. Il fabrique des collets pour attraper des animaux
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− | sauvages et tire le meilleur parti de ses prises, ainsi qu’il l’explique « j’avais de nombreux pièges pour
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− | capturer des lapins, des perdrix. J’en faisais des natures mortes que je vendais, puis nous mangions
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− | les lapins ».
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− | 5. Maison dans l’Indre, près de Gargilesse (coll. C. et B. Marlat)
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− | Ces occupations matérielles lui procurent la satisfaction de s’affranchir des contraintes, ce qu’il a
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− | toujours cherché, pour lui permettre de poursuivre sa création artistique. Il peint et vend des natures
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− | mortes, mais aussi de nombreux portraits de gens de la région. Il fabrique lui-même les cadres pour
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− | ses tableaux qu’il sculpte en style Louis XVI, une autre occasion de travailler le bois.
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− | Son habileté s’est exercée avec autant de succès dans un autre domaine, les jeux d’adresse. Il est
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− | capable d’enchaîner avec brio tours de passe-passe, manipulation de cartes ou de bilboquets de
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− | toutes tailles. Il apprécie particulièrement le billard où la stratégie se combine à la précision du geste.
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− | Ce dont tous ses amis se souviennent, c’est qu’il ne se contente pas de montrer son adresse, il la met
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− | en scène. Il sait faire attendre un public, le mystifier et l’amuser car il manipule tout aussi bien le
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− | langage. Il est friand de jeux de mots, de contrepèteries. A l’image de sa conversation, les cartes qu’il
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− | écrit allient l’humour à une expression pleine de réalisme. Lorsque sa femme décide de passer le
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− | permis de conduire, il lui réécrit en vers le code de la route. Il ne reste malheureusement pas de trace
| |
− | de cet exercice de style. Il aime contrefaire les accents régionaux et il apprend tout aussi aisément les
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− | langues étrangères, l’allemand à l’école, l’anglais « en lisant des romans d’Agatha Christie »,
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− | l’espagnol avec la méthode Assimil pour débuter, langues qu’il enrichira ensuite à l’occasion de
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− | toutes les rencontres qu’il fera.
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− | Cette facilité semble dénoter une perception sonore aussi analytique que sa perception visuelle mais
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− | aussi un attrait pour la diversité des genres, le plaisir de goûter à tout.
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− | II La musique
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− | Après l’évocation de toutes ces capacités, on comprend mieux la réussite de Bouchet en matière de
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− | lutherie. La phrase qu’il utilise pour parler de sa première guitare « j’ai imaginé une Torres », prend
| |
− | pleinement son sens. Il se réfère aux instruments de ce maître espagnol, considéré comme l’inventeur
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− | de la guitare moderne, et il élabore un « scénario ». Il disait lui-même : « Quand j’ai envie de quelque
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− | chose, il faut que j’arrive à le faire. Je me dis, comment vais-je m’y prendre ? Je fais un plan ».
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− | S’agissant d’une guitare, il lui fallait sans doute un papier et un crayon pour noter les étapes. Son
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− | « cahier d’atelier »N correspond à cette démarche de création. Cette démarche s’est bien sûr nourrie
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− | de tout ce qui le liait à la musique en général, puis à la guitare à partir de 1936.
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− | La musique a toujours occupé une place importante dans la vie de Robert Bouchet. Enfant, il étudie le
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− | violon et remporte un premier prix en fin d’année. Mais il n’en n’aime guère la tessiture et l’abandonne
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− | pour le piano dont sa mère joue très bien. Il prend quelques cours et domine assez vite un instrument
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− | qui lui permet de jouer la musique à laquelle il est le plus sensible, celle de Debussy ou de Ravel.
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− | Bien des années plus tard, il sera capable d’étonner le guitariste Julian Bream en interprétant au
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− | piano chez lui le mouvement lent du Quatuor à cordes de Debussy. Bream évoque ainsi ce souvenir :
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− | « Il ressent vraiment la musique d’une façon très sensible. C’est bien sûr une très belle oeuvre, mais
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− | cela m’a paru tellement extraordinaire qu’il puisse jouer cela – ce n’est pas une pièce pour piano – et
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− | le jouer parfaitement. Il me semble qu’il s’agit d’une personne hors du commun et que sa personnalité
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− | singulière est d’une certaine façon à l’oeuvre dans les instruments qu’il fabrique ». [Guitar
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− | International, July 1985]. C’est évidemment un bel hommage venant du musicien qu’est Bream.
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− | Lorsque Bouchet emménage à la Cité des Artistes de la rue Ordener, en 1936, il estime qu’il ne peut y
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− | mettre un piano sans risquer de gêner ses voisins. C’est alors qu’un ami lui prête une guitare, il est
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− | conquis par cet instrument. Il en aime la forme et les sonorités. Comme pour tout ce qui suscite son
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− | intérêt, il se documente, explore le domaine. Il va notamment au concert, et assiste, très ému à celui
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− | de la toute jeune Ida Presti. Il commence à fréquenter le cercle des « Amis de la guitare » qui vient de
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− | se constituer en association. Le président d’honneur est Emilio Pujol et le but de l’association est de
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− | faire rayonner l’enseignement de Francisco Tarrega. Le premier événement organisé par l’association
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− | est de remettre en état la tombe de Fernando Sor au cimetière Montmartre et d’y organiser un
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− | hommage. Sur une photo de cet événement [photo 6], on reconnaît André Verdier, Emilio Pujol,
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− | Mathilde Cuervas, Ida Presti et derrière elle Madeleine Cottin, soeur d’Alfred Cottin qui était l’ami de
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− | Tarrega. Les réunions hebdomadaires de l’association se tiennent dans le salon d’André Verdier, rue
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− | Saint-Louis-en-l’Île. C’est là que se rencontrent les guitaristes étrangers de passage à Paris.
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− | 6. Autour de la tombe de F. Sor, juillet 1936 (coll. privée, DR).
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− | On s’échange des partitions, des transcriptions, on écoute les guitares de chacun. Bouchet forme
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− | ainsi son oreille aux sonorités des belles espagnoles : Torres, Garcia, Simplicio que possède Verdier.
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− | Peu après, il fait la connaissance de Julian Gomez Ramirez qui vient de faire une guitare pour Ida
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− | Presti. Ce luthier espagnol installé à Paris depuis 1911 a été formé à Madrid dans l’atelier de José
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− | Ramirez. [photo 7]. Julian Gomez a vraisemblablement travaillé ensuite auprès de Manuel, le frère de
| |
− | ce dernier. Il connaît donc la tradition de lutherie madrilène mais aussi les recherches de Manuel sur
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− | Torres. En 1938, Bouchet lui commande une guitare et en suit la construction au cours de visites
| |
− | régulières. [photo 8]. Il enregistre ainsi les gestes qui seront, presque 10 ans plus tard, à l’origine de
| |
− | ses premières guitares.
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− | 7. Gomez Ramirez dans son atelier 8. Guitare Gomez Ramirez, 1938 de R. Bouchet
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− | (coll. Musée de la musique). (coll. Musée de la musique, photo Jean-Marc Anglès ).
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− | III La lutherie
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− | En 1945, après la guerre, Bouchet retrouve Paris, son atelier et son poste de professeur qui ne
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− | l’occupe que le matin. Il envisage la construction d’une guitare, il « imagine une Torres ». Il réunit ses
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− | souvenirs, rassemble des outils, en fabrique quelques-uns. Il observe à nouveau les guitares de
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− | Verdier qui reprend les activités de l’association. Lors d’une de ces réunions, Ida Presti est entourée
| |
− | de Daniel Rodriguez Grima, propriétaire de la guitare Simplicio que joue Ida, de André Verdier et de
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− | Lucien Corbani [photo 9]. Bouchet rend également visite à Alain Vian, antiquaire en instruments de
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− | musique. Celui-ci se souvient de la curiosité de Bouchet : « Toutes les guitares l’intéressaient, les
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− | françaises du XIXe siècle et les espagnoles dont il s’étonnait de la finesse de table. Il ne prenait jamais
| |
− | de mesure, un examen esthétique et un petit coup d’oeil à l’intérieur pour voir si c’était propre ».
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− | 9. Ida Presti chez André Verdier (coll. Musée de la musique).
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− | Sa première guitare est achevée en 1946 et l’expérience lui procure un grand plaisir, il est parvenu à
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− | comprendre un fonctionnement complexe et à le reproduire. Ses amis musiciens sont impressionnés
| |
− | par le résultat et l’encouragent à continuer. Il construit un second instrument pour Lucien Corbani, un
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− | poissonnier reconverti en fabricant de cordes, ce que Bouchet expliquait ainsi : « Il s’est dit, je vends
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− | des soles et des raies, pourquoi pas des mi, des la et des si ». Avec la guitare n° 4, en érable,
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− | Bouchet estime sans doute avoir atteint un bon résultat car il la présente comme une « Torres » et la
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− | garde pour lui. Peut-être est-ce avec cet instrument, en bois clair, qu’il est photographié chez Verdier
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− | en 1948 [photo 10]. En face de lui, André Verdier joue sa Simplicio et Jean Lafon, musicien de
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− | l’orchestre de l’Opéra, violoncelliste et guitariste sa Torres.
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− | 10. Bouchet chez Verdier (coll. J. Vincenti, DR).
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− | Sur une autre photo de cette période [photo 11], on remarque la grande similitude entre le barrage de
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− | la table d’harmonie de la guitare que montre Bouchet et ceux que faisaient Torres : 7 brins disposés
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− | en éventail, que ferment deux barres formant un « V ». On voit également les outils qu’il a
| |
− | confectionnés : petits rabots et plate-forme de montage.
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− | 11. Robert Bouchet dans son atelier, avant 1950 (coll. S. Orsi, DR).
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− | Comme pour toutes ses réalisations, Bouchet en soigne les moindres détails : il dessine son étiquette
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− | [photo 12] et confectionne une presse pour les imprimer ; il grave les plaques de ses mécaniques
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− | d’accord et façonne les boutons en ivoire [photo 13].
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− | Sa pratique de musicien n’a pas cédé à la lutherie. Les quelques cours qu’il a pris avant guerre avec
| |
− | Ida Presti ont été mis à profit, il est capable de jouer les belles pièces du répertoire. En 1951, Il se
| |
− | rend à Madrid avec son épouse. Il y rencontre des guitaristes comme Daniel Fortea [photo 14] mais
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− | 12. Etiquette (photo J. M. Anglès). 13. Détail de la gravure (photo C. Marlat).
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− | surtout Marcelo Barbero, un des rares luthiers encore vivant en Espagne à l’époque. Sans doute
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− | curieux de confronter sa compréhension de la lutherie avec un héritier direct de la tradition espagnole,
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− | Bouchet passe plusieurs jours dans son atelier. En guise de cadeau d’adieu, Barbero lui offre une
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− | table d’harmonie et revenu en France, Bouchet lui enverra également du bois.
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− | 14. Autographe de D. Fortea pour R. Bouchet (coll. C. et B. Marlat).
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− | Nous avons une autre trace de son travail de lutherie grâce aux « rondelles » qu’il a conservées à
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− | partir de la seizième guitare. Il s’agit de la partie de la table que l’on retire pour créer la rose [photo
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− | 15]. Bouchet inscrit sur ces rondelles la provenance du bois et sa qualité, des indications d’épaisseur
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− | de table, une évaluation du résultat sonore et parfois le nom du destinataire. La rondelle n°28, par
| |
− | exemple, vient de la table donnée par Barbero [photo 16].
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− | 15. Rondelles conservées par Bouchet 16. Table donnée par Barbero
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− | (coll. C. et B. Marlat). (coll. C. et B. Marlat).
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− | Ces traces claires et palpables de son travail lui servaient sans doute d’aide-mémoire. Elles sont
| |
− | précieuses aujourd’hui. Elles nous renseignent, par exemple, sur le changement majeur qu’il introduit
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− | dans son barrage de table en 1957. Il s’agit de l’ajout d’une barre placée sous le sillet du chevalet, la
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− | « barre d’âme ». Selon ses propres mots, il a introduit cette modification pour « donner plus de
| |
− | consistance aux aigus et plus de souplesse aux basses », il pense ainsi « avoir trouvé un bon moyen
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− | d’équilibrer le son ». Cette innovation est, dira Bouchet, inspirée du barrage qu’il a vu dans une
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− | guitare qu’il a achetée peu avant. Elle est l’oeuvre du luthier parisien Pierre René Lacote en 1828
| |
− | [photo17]. Bouchet en apprécie particulièrement les qualités sonores - la durée de son et « les aigus
| |
− | jaillissants, des aigus du tonnerre ». On peut donc penser que si Bouchet s’en est inspiré c’est qu’il a
| |
− | eu l’intuition que cet élément lui permettrait d’obtenir le son qu’il cherchait.
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| |
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| |
− | De fait, avec cette « barre d’âme », Bouchet atteint la sonorité chaleureuse, riche et équilibrée des
| |
− | guitares qui vont être appréciées de nombreux concertistes.
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− | 17. Guitare Lacote 1828 ayant appartenu à R. Bouchet (coll. C. et B. Marlat).
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− | IV La notoriété
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− | Entre-temps en effet, la guitare a gagné un public plus large. Plusieurs événements accompagnent ce
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− | mouvement.
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− | En 1952, commence à la radio, la diffusion d’une émission qui contribue à la popularité de
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− | l’instrument : Des notes sur la guitare, elle est animée par Robert Vidal. Christian Aubin, Jean
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− | Borredon puis Alexandre Lagoya et Ida Presti seront les premiers guitaristes à y participer. C’est aussi
| |
− | l’époque où Gilbert Imbar créé le Club Plein Vent qui propose des concerts et des cours. Quelques
| |
− | années après, Vidal encore, crée le Concours international de Guitare qui attire à Paris des musiciens
| |
− | de tous les pays. A l’exemple de Verdier, Bouchet reçoit maintenant chez lui, le samedi après-midi,
| |
− | guitaristes et amis. Dans une ambiance joyeuse, car Bouchet tire parti de ses talents d’amuseur, la
| |
− | dernière guitare terminée est mise à l’épreuve. En témoignent quelques photos. Sur l’une, sont réunis
| |
− | autour de Lagoya, Lucien Corbani - le fameux poissonnier, Jean Borredon que nous venons
| |
− | d’évoquer, R. Bouchet, Hernando Viñes, neveu du pianiste Ricardo Viñes et peut-être deux des frères
| |
− | Vian [photo 18].Une autre photo, sur le balcon devant l’atelier, montre Bouchet, Verdier, Lagoya, peutêtre
| |
− | Ida Presti dans l’ombre de Julian Bream et à droite, Andrée Bouchet, l’épouse de Robert [photo
| |
− | 19].
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| |
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− | 18. Autour d’Alexandre Lagoya (coll. L. Borredon, DR). 19. Bouchet et Bream (coll. particulière, DR).
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− | Ces réunions sont aussi l’occasion de rencontrer de futurs clients amateurs ou concertistes, Bream
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− | notamment pour qui Bouchet construira 3 guitares. Plusieurs enregistreront des disques sur leur
| |
− | guitares Bouchet dans la collection « Anthologie de la guitare » que dirige Robert Vidal chez RCA,
| |
− | parmi eux le célèbre duo Ida Presti et Alexandre Lagoya, Manuel Lopez Ramos et le duo argentin,
| |
− | Pomponio et Zaraté, que Bouchet surnomme gentiment « Pomponette et Martinette » [photo
| |
− | 24].Viennent ensuite les guitares faites pour Konrad Ragossnig, Oscar Ghiglia, Turibio Santos qui
| |
− | sont tous trois lauréats du Concours International de Guitare de Paris.
| |
− | 20. Rondelles des guitares pour Presti et Lagoya
| |
− | Jusqu’en 1970, Bouchet construit environ 6 guitares par an. L’âge venant, le rythme se ralentit. Mais il
| |
− | reste toujours prêt à retourner à l’établi pour montrer un geste, une façon de faire.
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| |
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− | 24. Rondelles des guitares du duo Pomponio Zarate (coll. C. et B. Marlat).
| |
− | Car la faveur dont jouit la guitare crée aussi des vocations de luthier. Bouchet reçoit avec
| |
− | bienveillance ceux qui viennent le voir. Il est heureux d’enseigner ce qu’il a compris lui-même, il donne
| |
− | des conseils, répond aux questions. Il guide ainsi de nombreux luthiers à différents stades de leur
| |
− | évolution. Il acquiert une figure de grand aîné qui est confirmée en 1967, année où il siège au côté
| |
− | d’Ignicio Fleta, comme membre du jury pour le Concours international de Lutherie de Liège [photo 25].
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− | 25. Composition du jury, Liège, 1967 (coll. D. Friederich).
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| |
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− | Si Robert Bouchet a ainsi atteint une grande notoriété, cela tient à notre avis à trois raisons majeures :
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− | le résultat qu’il a obtenu en réalisant une synthèse entre la tradition espagnole et une sensibilité
| |
− | française, réunissant deux types de son qu’il appréciait ; le rôle qu’il a tenu dans l’évolution de la
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− | lutherie à travers tous les luthiers qu’il a conseillés et influencés ; l’exemple qu’il a personnifié,
| |
− | montrant qu’il pouvait y avoir de grands luthiers hors d’Espagne.
| |
− | Il est à son tour devenu un référent. Ses guitares, très recherchées par les collectionneurs comme par
| |
− | les guitaristes sont toujours jouées en concert. [photo 26]
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| |
− | 26. Etiquette (photo J. M. Anglès)
| |
− | Pour terminer, vous pouvez entendre Robert Bouchet lui-même, enregistré en 1978 pour la BBC, lors
| |
− | d’un entretien en anglais avec Michael Jessett.
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− | Extrait 1 : La première guitare.
| |
− | M.J. – Vous vous souvenez sans doute de la fabrication de votre première guitare ?
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− | R.B. – Oh oui, c’était très amusant.
| |
− | M.J. – À quel modèle vous référiez-vous ?
| |
− | R.B. – J’ai imaginé une Torres, guitares pour lesquelles j’ai une grande admiration et j’ai essayé d’en
| |
− | faire une aussi semblable que possible.
| |
− | Extrait 2 : Les qualités d’un bon luthier.
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− | M.J. – Quelles sont, à votre avis, les qualités importantes pour un luthier ?
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− | R.B. – Avoir une appréciation intuitive de la matière, être obsédé par le désir de qualité, rejeter tout ce
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− | qui n’est pas absolument correct, utiliser la meilleure qualité de colle, vernir au tampon. Je ne colle
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− | jamais avant que les pièces ne s’assemblent parfaitement.
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− | Extrait 3 : L’innovation de 1957.
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− | M.J. – Depuis environ 1957 ou 58, vous avez opéré, je pense, un vrai changement.
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− | R.B. – Oui, une barre en travers de la caisse, sous le sillet du chevalet.
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− | M.J. – Dans quel but avez-vous fait cela ?
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− | R.B. – Pour donner plus de consistance aux aigus et plus de souplesse aux basses. Je pense avoir
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− | trouvé un bon moyen d’équilibrer le son entre basses et aigus.
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− | Extrait 4 : Le « cahier d’atelier ».
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− | M.J. – Avec toute l’expérience que vous avez, n’avez-vous pas été tenté d’écrire un livre ?
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− | R.B. – Oui, j’ai écrit un livre.
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− | M.J. – Est-il publié ?
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− | R.B. – Non, il est dans mon placard, je pense que je le donnerai au Conservatoire après mon départ
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− | pour ma troisième résidence.
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